Une nouvelle analyse d'un document médiéval énigmatique suggère qu'il ne contient que des suites de mots dépourvues de sens.
Gordon Rugg
En 1912, Wilfrid Voynich, un libraire américain spécialiste de livres
rares, fit la découverte de sa vie dans la bibliothèque de la Villa
Mandragone près de Rome : un manuscrit de quelque 230 pages écrit en
caractères étranges et illustré de surprenants dessins de plantes, de
sphères célestes et de baigneuses
(voir la figure 1).
À première vue, le manuscrit ressemblait à un manuel d'alchimiste ou
d'herboriste, mais il était entièrement codé. Certains détails des
illustrations suggéraient que l'ouvrage avait été rédigé entre 1470 et
1500, et une lettre du
xviie
siècle jointe au manuscrit indiquait qu'il avait été acheté en 1586 par
l'Empereur Rodolphe II. Le manuscrit avait ensuite disparu jusqu'à ce
que Voynich le redécouvre.
Voynich a demandé aux meilleurs
cryptographes de l'époque de décoder les caractères étranges, qui ne
correspondent à aucune écriture connue. Cependant, après 90 années
d'efforts, personne n'a été capable de déchiffrer le manuscrit, et sa
nature comme son origine restent un mystère. Devant ces échecs répétés,
on a commencé à douter de l'existence d'un message à déchiffrer : le
manuscrit de Voynich est peut-être un canular sophistiqué dépourvu de
sens.
Comment un mystificateur aurait-il pu concevoir 230 pages
présentant tant de régularités dans la structure et la répartition des
mots ? Le manuscrit de Voynich semble trop compliqué pour n'être qu'un
assemblage de mots incohérent. J'ai toutefois découvert que l'on peut
reproduire bon nombre de ses caractéristiques à l'aide d'un outil de
codage simple qui existait au xvie siècle.
Le texte engendré grâce à cette technique ne peut évidemment avoir de
sens, mais il ressemble pourtant étrangement au manuscrit original. Ce
résultat ne prouve pas que le manuscrit...